Être chien de cinéma, c’est facile ?
Un grand nombre de films, séries ou pubs télévisés mettent en valeurs des chiens. Qu’ils aient un rôle principal comme Lassie, ou qu’ils soient plus figuratifs, les chiens attirent toujours notre attention à l’écran. Ils sont d’ailleurs souvent ceux pour qui va toute notre empathie : impossible de ne pas pleurer à la mort d’un chien dans un film, mais cette règle n’est pas toujours valable pour les humains… ?
Mais alors, qui sont ces chiens que nous aimons tant ? Des chiens « acteurs » ou des chiens « normaux » ? Le métier d’acteur est-il difficile pour un chien ?
Le rêve du cinéma
Qui n’a jamais voulu voir son chien à la tête d’une affiche de film, sur petit ou grand écran ? Qui n’a jamais rêvé de faire de son chien (ou son animal) une véritable star ? Soyons francs, qu’il soit modèle pour une publicité, icône d’une marque ou qu’il joue un véritable rôle, nous espérons tous (ou presque) de vivre un jour ces expériences.
De plus en plus, des agences de casting spécialisées dans le chien et le chat, proposent d’ailleurs leurs services, et vous offrent la possibilité de réaliser un jour un projet avec votre animal.
De même que des dresseurs pour le cinéma, recherchent assez souvent de nouveaux profils de chiens qu’ils n’auraient pas chez eux. En cas de projet concret, ils peuvent vous proposer de prendre votre chien en vacances chez eux, ou de venir régulièrement chez vous, pour préparer au mieux, votre chien pour le tournage. Il peut vous être possible d’accompagner le dresseur sur le tournage le jour J, mais le mieux étant de le laisser faire seul, pour ne pas perturber le travail du chien par votre présence.
Notre contribution au cinéma, pas très « académique »
Nous, ne fonctionnons pas vraiment de la sorte. Nous avons d’ailleurs commencé le cinéma assez récemment, il y a 5 ans de ça. Avant, nous avions tout de même participé à des tournages, mais de façon moins régulière.
Nos envies actuelles ne nous ont pas (encore !) poussé à travailler avec des chiens de particuliers. Notre équipe canine est composée de 9 chiens (Border Collie de plusieurs couleurs, tailles, type de poils, Beauceron, Malinois, Epagneul Breton et un grand croisé à poils durs), qui, pour la majorité d’entre eux, ont suivi une formation axée sur le spectacle vivant. C’est à dire qu’ils ont appris à performer dans de multiples situations, sont capables de s’adapter facilement et rapidement à des changements, possèdent des bases d’éducation très solides, de même qu’un large panel de « tricks », entrainés à haut niveau. Nous nous sommes donc aperçu que notre travail pour le spectacle, nous offrait beaucoup de facilités pour le cinéma 😉
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Mais alors, c’est plus simple ?
La plus grande différence entre les deux est que le spectacle n’offre pas plusieurs prises. Les actions des chiens doivent donc être préparées jusqu’à ce qu’elles frôlent la perfection. En spectacle, malgré les différents lieux dans lesquels nous nous produisons, la scénographie est toujours identique, la taille du plateau sensiblement la même, les actions du ou des chiens sont rodées et ne changent pas. Au cinéma, nous n’avons parfois que des idées vagues des actions demandées, et n’avons pas toujours les informations de distance, les axes caméra, le nombre de personnes dans la séquence et ce qu’ils font autour du chien. Par exemple, dans L’Homme que j’ai Condamné, Filix devait jouer un chien mort. Un exercice qui peut s’avérer difficile de base, puisque le chien doit être d’une immobilité parfaite, mais qui se compliquait par la venue de la comédienne qui, en pleurant et en hurlant, venait caresser son chien.
À l’inverse, il arrive que nous ayons une demande très précise des actions du chien, que nous les préparions en profondeur, et que le jour du tournage, un élément vienne bousculer notre apprentissage. Dans Le Temps est Assassin, nous avions appris à Flipper à suivre un comédien si celui ci tapait sur sa cuisse avec sa main gauche. Quelle ne fut pas notre surprise, lorsque nous avons appris que le personnage en question était handicapé et ne pouvait pas bouger cette main-ci.
Le fait de pouvoir faire plusieurs prises au cinéma ne rend pas l’exercice plus facile, juste différent. D’abord parce que la répétition à outrance des actions (pour diverses raisons) peut finir par dégouter le chien, et rendre le travail contre productif. Le tournage de certaines scènes peuvent parfois durer des heures, nécessité beaucoup de plans différents, durant lesquels le chien devra faire encore et encore la même action, avec le même entrain et la même précision.
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La précision est d’ailleurs un point assez important. Suivant les plans, la place du chien pourra être très restreinte, nécessité une immobilité parfaite, parfois dans des positions et des endroits pas toujours des plus confortables, devra regarder à un endroit bien précis, ne pas trop bouger s’il veut être dans la bonne zone de netteté… .
Sur le tournage de Rémi sans Famille de Antoine Blossier, il nous est arrivé de devoir placer « la tête du chien un peu plus en bas – non en fait, qu’il la relève un tout petit peu – s’il peut se tourner un tout petit peu à droite… » pour obtenir un placement parfait de Darkness, alias Capi.
Comme pour le spectacle, la préparation d’un chien pour un projet cinéma demande beaucoup de temps, de réflexion, et d’adaptation !
Vous l’aurez compris, le cinéma, c’est pas toujours de tout repos 😉
L’art d’être naturel
Les deux choses les plus difficiles pour un chien de cinéma : être naturel, et ne rien faire.
Au cinéma, un chien est rarement seul, il est souvent « le chien de quelqu’un ». Notre travail est donc de faire en sorte que la relation chien/comédien soit vraie et sincère. Même si pour certains projets, les deux se découvrent lors du premier jour de tournage, il est important que le spectateur croit à une relation de longue date. Pour ça, nous apprenons au chien à suivre, regarder, interagir avec le comédien, en étant toujours attentif à nos demandes (parfois sans parole pour ne pas perturber la prise de son), mais sans s’intéresser à tout ce qu’il se passe autour de lui (caméra qui bouge, perche, équipe technique, dresseur qui se déplace, d’autres comédiens…). Grâce à certains comédiens, la création du lien peut être assez rapide, et nous avons eu la chance de croiser la route de comédiens qui s’impliquaient réellement dans cette relation. Pour d’autres, qui n’aiment pas forcément les chiens, ou qui préfèrent se concentrer sur ce qu’ils ont à faire (il faut dire qu’ils ont beaucoup de choses à penser !), c’est à nous de prendre le relai à 100%, et de faire croire à une connexion qui n’existe que lorsque les caméras tournent.
Il peut arriver qu’un réalisateur demande du chien qu’il fasse des actions qu’il ferait quotidiennement : bailler, se gratter, se lécher, boire, se secouer. Des actions qui sont non seulement très difficiles à apprendre sur ordre, mais qui sont encore plus difficile à réaliser plusieurs fois de suite (à la 12ème prise, si le chien n’a plus soif… il n’a plus soif).
De même lorsque le réalisateur souhaite que le chien « ne fasse rien ». Ne rien faire est un exercice difficile au théâtre. Il l’est aussi pour le chien. Ne rien faire malgré toute une équipe technique qui bouge et s’agite, des dialogues, des déplacements, des engeulades, parfois, demande au chien une grande concentration, un grand contrôle de soi, et surtout… une très bonne éducation. Sur un tournage récent, Kodi devait dormir sur un lit, avec son maître. À cette action s’est rajoutée une comédienne, qui entrait dans la pièce et venait s’assoir sur le lit. Son maître se redressait, et tout deux entamaient une conversation. Pendant toute cette action, Kodi devait continuer de dormir, sans bouger.
Mais alors le cinéma, pour qui ?
Je pense que tous les chiens sont capables de faire du cinéma, s’ils sont préparés correctement et sont bien accompagnés. À savoir cependant, que les chiens les plus rodés en matière de tricks et d’obéissance, pourront avoir plus de mal à ignorer leur maître, ou à avoir l’air d’attendre un ordre en le fixant, ce qui rendra sa présence dans le cadre pas assez naturelle.
Au contraire, certains chiens qui possèdent moins de technique arriveront plus facilement à être naturels, mais pourront avoir du mal à devoir faire et refaire les mêmes actions.
De manière générale, il est important que le chien de cinéma soit capable de s’adapter aux situations qu’on lui propose. Le fait de savoir faire beaucoup de choses peut être un atout, comme peut l’être le fait de savoir improviser. Dans une séquence de 3 X Rien, le maître de Max devait, avec des copains, exprimer une grosse sensation de joie. Max avait le droit de réagir un peu, de tourner autour des compères, d’avoir l’air content lui aussi. Lorsque le comédien, en sautant de joie, à mis les mains en l’air, Max lui a sauté dans les bras. Ils ont donc fini la séquence en dansant tous les deux, ce qui a beaucoup plu à la réalisatrice.
Conclusion :
Être un chien de cinéma peut être donné à tous les chiens, mais savoir l’accompagner n’est pas donné à tout le monde 😉
Le cinéma demande rigueur, adaptation, adaptabilité, réflexion et imagination. Si le stress du direct peut être intense en spectacle, la pression des réalisateurs et des producteurs peut être tout aussi importante.
Comme tout comédien, le chien devra connaître son texte par coeur, et être capable de changer 2-3 mots si le jeu s’y prête bien. Rigueur et adaptabilité, donc 😉
Et vous ? Vous voulez faire du cinéma avec votre chien ?
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